En réalité, celles-ci accentuent la
pression sur les ressources en eau, nuisent à la biodiversité et continuent
d’alimenter un modèle agro-industriel dévastateur…
Les méga-bassines sont d’énormes bassins artificiels, plastifiés et imperméables destinées à répondre aux besoins de l’agro-industrie, notamment en période estivale. Une méga-bassine s’étend en moyenne sur une superficie de huit hectares, soit l’équivalent d’une dizaine de terrains de football ! Les plus grandes vont jusqu’à s’étaler sur 18 hectares.
Officiellement
baptisées « réserves de substitution » par leurs promoteurs, ces
méga-bassines sont censées être remplies durant la période hivernale afin de
permettre aux agriculteurs de continuer à irriguer leurs cultures lors des
périodes de sécheresse et de fortes tensions sur la demande en eau.
Pourquoi ces méga-bassines posent problème
?
Tout
d’abord, contrairement à ce que voudraient laisser croire leurs
promoteurs, les méga-bassines ne sont pas simplement alimentées par les
eaux de pluie. Elles nécessitent des opérations de pompage, que ce soit
des nappes phréatiques ou des cours d’eau. Ces pompages ont beau avoir lieu en
hiver, ils accentuent la pression sur les ressources en eau, alors que les
nappes phréatiques peinent à se reconstituer.
Par
ailleurs, les méga-bassines ont un impact sur le milieu naturel et la
biodiversité. En stockant une eau qui se serait infiltrée dans les sols ou
aurait ruisselé dans les cours d’eau, elles privent les écosystèmes
environnants d’une ressource vitale, qui permet notamment aux zones humides et
aux sols de se reconstituer pendant la période hivernale. Elles transforment
également une ressource courante et vivante en eau stagnante, qui s’évapore et
se dégrade. Les pertes liées à l’évaporation se situeraient entre 20% et
60%, selon Christian Amblard, directeur de recherche honoraire au CNRS et
spécialiste de l'eau et des systèmes hydrobiologiques.
Autre
problème majeur : les méga-bassines contribuent à une fuite en avant pour maintenir
coûte que coûte un modèle agro-industriel dévastateur. Elles sont inadaptées
face au changement climatique car elles servent essentiellement à alimenter des
productions très gourmandes en eau, comme le maïs, majoritairement destiné à
l’élevage industriel. Elles servent avant tout les intérêts des acteurs
agro-industriels, au détriment de solutions locales et paysannes. En
subventionnant ces ouvrages, les pouvoirs publics contribuent encore à
l’industrialisation de l’agriculture et à un usage accru d’engrais chimiques et
de pesticides. Autant de substances qu’on retrouve par la suite dans le milieu
naturel.
Existe-il d'autres solutions ?
Plus
qu’une solution unique, c’est un changement profond du modèle agricole et
de l’aménagement du territoire qui est nécessaire :
- moins d’artificialisation des sols,
- soutien à des pratiques agricoles qui restaurent les sols et leur capacité de stockage,
- valorisation de cultures adaptées aux conditions climatiques,
- appui à l’agriculture écologique et locale,
En
2016, seuls 24 % des céréales en Europe étaient cultivées pour nourrir
directement des humains. Autre chiffre intéressant : plus de 71% des
terres agricoles de l’Union européenne servent à alimenter le bétail. Il est
donc indispensable de réduire notre consommation et, par conséquent, notre
production de viande pour diminuer notre pression sur les ressources
naturelles et donner les moyens à un élevage écologique d’exister.
Des
solutions de stockage et des systèmes d’irrigation efficaces existent déjà dans
de nombreuses fermes agro-écologiques. Il faut donc avant tout sortir d’un
système agro-industriel toujours plus gourmand en eau et privilégier ces
solutions déjà mises en œuvre par l’agriculture écologique et paysanne.
Plusieurs dizaines
de projets de méga-bassines sont actuellement dans les tuyaux, avec l’appui de collectivités
locales, principalement en Nouvelle-Aquitaine et dans les Pays de la Loire,
mais aussi plus récemment en régions Centre et Bretagne. Certaines
méga-bassines, comme celles de Cram-Chaban, en Charente-Maritime, ont
continué de fonctionner illégalement pendant des années.
C’est pourquoi il faut :
- Faire cesser le fonctionnement des méga-bassines qui ont déjà été jugées illégales.
- Suspendre tous les travaux et projets de méga-bassines tant que des recours juridiques sont en cours en France et en Europe. Construire des méga-bassines alors que les recours ne sont pas encore épuisés revient à pratiquer la politique du fait accompli.
- Repenser notre modèle agricole et la gestion de l’eau en privilégiant des solutions peu gourmandes en eau, respectueuses de l'environnement et adaptées au changement climatique.
Plus
globalement, il est urgent de sortir du modèle agro-industriel et de soutenir
une agriculture écologique. Il faut mettre un terme à tous les financements
publics qui contribuent à l’industrialisation de l’agriculture et de l’élevage
et réorienter ces financements vers un soutien à une agriculture écologique...
Photo Creative Commons
> Lire tous les articles du blog
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire